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Le journal de la Forestière n°2

Le journal de la Forestière n°2 a été édité en 2017 par « La Forestière », un centre de jour pour personnes adultes présentant une déficience intellectuelle, qui se trouve à Ixelles. Matilde Solari qui est éducatrice spécialisée à la Forestière, m’a offert et fait découvrir ce fanzine, elle a participé à la mise en page et à l’impression des fanzines.

Matilde est née le 13 mai 1991 à Bruxelles, elle est fille de parents artistes et a toujours créer, après une année en céramique à La Cambre elle arrête pour finalement étudier à l’HEB Defré et devenir éducatrice spécialisée. Elle travaille aujourd’hui à la Forestière et crée avec des personnes déficientes mentales. Elle a récemment participé au projet « Le petit pangolin illustré » édité par Fanzinorama.

Les textes et illustrations du journal ont étés entièrement réalisées par les adultes qu’elle accompagne. Dans ces journaux les personnes qu’elle accompagne ont de la place pour s’exprimer, dessiner, écrire ce qu’ils/elles veulent. Leur permettant de nous partager leurs angoisses, leurs envies, leur quotidien… Ils deviennent donc les journalistes de la Forestière, nous partageant leur vision de l’actualité. Certains mettent des petites annonces car ils cherchent un travail ou l’amour. D’autres parlent des élections présidentielles en France, du 1er mai, de la fête des mères…

En lisant le journal on se plonge pour quelques instants dans un monde qui semble juvénile, de par les fautes d’orthographe, la construction des phrases, les ratures et les dessins. Mais en réalité ils parlent de mariage, de sexualité, de drague, d’harcèlement, de mort, de leurs problèmes de vie d’adultes. Pendant un court instant on change nos repères pour se placer dans leur vision du monde, vision qui peut faire écho à notre vision du monde et nous permettre de le remettre en question. On cherche où est parti l’enfant qui est en nous et quand il est parti, on le fait revenir le temps d’une lecture, il est là à côté de nous à échanger avec notre nous actuel. Lors de mes premières lectures du Journal de la Forestière j’ai constaté que la plupart d’entre eux/elles veulent se marier, avoir un/une amoureux.es, détestent la violence, l’abus d’alcool ou de drogues. Matilde m’a fait part du fait que dans son travail elle se doit d’essayer d’apporter une certaine forme de stabilité aux gens qu’elle accompagne, de leur donner des repères pour les aider à s’insérer et s’adapter socialement. Ces mêmes repères qui sont parfois en opposition avec les pensées et remises en questions que Matilde opère dans sa vie. Lorsqu’elle remet en question la sexualité, le genre ou hétéronormativité elle ne peut pas vraiment se permettre de leur en parler et de bousculer leurs repères qui sont si précieux à leur sérénité. Cependant peut-être que dans un monde avec des normes différentes on ne leur transmettrait pas les mêmes valeurs. L’évolution de leurs valeurs serait peut-être signe d’évolution de la société dans sa globalité.

Par Etienne Bruneau
Travail réalisé dans le cadre du cours d’actualité de l’édition et du multiple à l’Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles, 2020, license CC-BY-SA.